Je suis sortie d’HEC il y a 11 ans et à l’époque pour attirer et retenir ceux qu’on appelle « les talents » (comme si tout le monde n’avait pas un talent) il fallait un nom, une marque, et savoir aligner les zéros. On mesurait sa valeur à sa fonction sur sa carte de visite, au prestige de l’entreprise (souvent prestige et taille se confondaient) et au montant de sa feuille de paie.
Aujourd’hui les « talents » – hauts potentiels, leaders, pépites, « rising stars », – attendent autre chose, quelque chose de bien plus compliqué à offrir : les talents veulent du sens. Ils veulent comprendre le pourquoi de leur métier ; et avoir un impact positif sur la société.
Aujourd’hui les talents sont exigeants. Non seulement ils veulent appartenir à la « vraie » économie, grandir dans l’entreprise, exercer un métier qui les challenge, les passionne et les valorise. Mais aussi changer le monde à leur échelle. Une transformation culturelle de ce qui définit le « succès » s’opère. Dans les cercles où on parlait argent, carrière, promotion, on parle aujourd’hui de sens, de valeurs, et souvent d’entreprendre.
Aux entreprises de s’adapter ! Et de faire leur métier en impactant positivement la société pour attirer et retenir ces talents. L’enjeu est de taille. Dans une récente étude IPSOS – BCG, 2/3 des alumni de grandes écoles, disent vouloir travailler dans l’Economie Sociale et Solidaire… tous ne le feront pas, mais c’est une tendance de fond.
Beaucoup d’entreprises répondront qu’elles se sont déjà engagées, qu’elles travaillent à réduire leur empreinte écologique, qu’elles développent le mécénat d’entreprise, qu’elles ont créé une fondation. C’est bien. Mais est-ce assez pour pouvoir contribuer vraiment à une société plus vertueuse ? A une économie inclusive et durable ? A une transformation profonde de notre société et de nos économies ?
Il faut aller plus loin. Réinventer les business, apprendre à innover frugalement, à faire mieux avec moins, à servir des clients de plus en isolés, de plus en plus pauvres, à intégrer les parcours de vie compliqués dans les équipes, à penser empreinte écologique dans chacune des décisions business, à remettre en cause la tendance naturelle à l’obsolescence programmée…. Vaste programme !
La bonne nouvelle c’est que les talents, ceux qui sont capables de sortir du cadre, de questionner l’ordre établi, d’être agiles et d’innover, se battront pour cette aventure. L’autre bonne nouvelle c’est que remettre la responsabilité d’entreprise au cœur de sa stratégie permet de mieux performer – d’après France stratégie il y a un écart de performance de 13% entre les entreprises qui mettent en place des pratiques RSE et celles qui ne le font pas.
Alors dans un monde qui demain sera fait d’incertitudes, et où les entreprises auront plus que jamais besoin de talents pour grandir, faire le bien et innover socialement permettra très certainement de gagner la guerre des talents !
Laurence Grandcolas est fondatrice de MySezame, qui propose des formations sur l’innovation sociale et sur une nouvelle ESS, à la croisée du business et de l’impact.